La douleur de la mort de deux de nos concitoyens (italiens) sur le champ de bataille confus de Lybie, a de nouveau attisé un conflit politique interne qui se développe maintenant sans retenue ni limite dans l’expression, et qui a alimenté un sentiment de peur et de repli à l’intérieur des frontières. L’Europe tombe en morceaux, comme un géant aux pieds d’argile, sous la pression de milliers d’hommes, de femmes, d’enfants en provenance de la Syrie, l’Irak, l’Afghanistan, et de nombreux pays africains. A l’heure actuelle, on ne fait même plus la distinction subtile (et souvent brutale) entre réfugiés et «migrants économiques», face aux multitudes qui campent dans des enceintes sous contrôle.
Nous pouvons reconnaître aujourd’hui la vérité des paroles de Max Frisch (comme le rappelle Lucio Caracciolo dans un brillant éditorial paru récemment sur Limes), qui déclarait, commentant la migration d’après-guerre des Italiens vers la Suisse pour faire les tâches les plus ingrates, « on voulait des bras, et ce sont des hommes qui sont arrivés “: des hommes humiliés dans leur attente élémentaire d’être considérés comme tels, comme des visages à regarder, des mains à serrer, des corps à guérir, des cœurs consoler, des gens à qui parler.
Rejeter, déplacer, combattre, sont les verbes de la nouvelle Europe, préoccupée de maintenir sa tranquillité tout en ayant peur des vents de guerre qui soufflent maintenant à sa porte. Et pourtant, l’Ours d’or de Berlin, a été attribué à un film qui célèbre Lampedusa et ses habitants, lointaine périphérie chaleureuse et maternelle d’un continent sans âme et sans intelligence.
Ce seront peut-être les banlieues de nos villes, de notre monde, de notre culture, qui nous sauveront : s’ouvrir à elles est non seulement un acte de miséricorde, mais la seule façon de recueillir cette humanité cachée qui vit encore, en dépit de tout égoïsme et méchanceté, et qui pourra nous délivrer de l’indécision des puissants et des peureux.
Déclaration du Président du MEIC
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